samedi 11 mars 2017

Résumé de lecture - The patient paradox (2012)



Petit résumé de lecture pour les francophones intéressés à la médecine fondée sur les faits (evidence based medicine, EBM), du livre "The patient paradox", par Margaret McCartney (publié en 2012) [1].

 
Le livre en bref :

En introduction quelques rappels sur les risques relatifs, les bénéfices absolus, comment les chiffres peuvent être présentés différemment pour donner l'impression d'être importants. Le surdiagnostic, le surtraitement, les difficultés à définir la "norme" même pour des experts, les pressions des industries qui s'insinuent partout ou presque pour y gagner et influencer.

Quelques pratiques bienveillantes introduites avant que des preuves suffisantes ne puissent les soutenir, qui sont ensuite établies comme étant inutiles voire problématiques et deviennent difficiles à changer. Présentation de nombreux dépistages (cancer du côlon, du sein, des testicules, de la prostate), et du nombre de personnes obtenant un réel bénéfice comparativement à ceux testés (et dont les tests mènent parfois à d'autres tests, plus de traitements, etc. alors que la situation était bénigne et aurait bien souvent disparu d'elle-même ou jamais posé de problèmes).

McCartney fait fréquemment référence à Gilbert Welch, l'un des auteurs de "Le surdiagnostic : rendre les gens malades par la poursuite de la santé", que j'ai également déjà lu et les contenus se croisent très souvent par rapport au dépistage, cancers, anomalies qui ne seront jamais des problèmes, etc. J'ai personnellement trouvé le livre de Welch plus compréhensif et explicite et je le suggérerais plutôt pour ceux qui s'intéressent à ces thèmes. Certains sujets n'apparaissent que dans un livre et non l'autre tout de même.

Description des bénéfices en terme de nombre de sujets à traiter (NNT) de plusieurs médicaments communs, et mise en avant de l'importance que le patient puisse décider en fonction de son évaluation, de ses préférences et de ses risques... Prendre ce médicament permet de prévenir un AVC chez une personne sur 335 (similaire à vous) le prenant pendant 5 ans... détails ... est-ce que cela vaut la peine pour vous? C'est pourtant tellement plus simple de ne pas demander, de suivre les recommandations du système informatique et d'offrir un traitement, ou de créer des outils d'aide à la décision qui n'offrent pas de réel choix.

Les problèmes des protocoles rigides, des évaluations qui ne prennent pas en compte que oui, le patient peut de manière informée décider qu'un test n'en vaut pas la peine et que blâmer le médecin pour ne pas avoir obtenu ses "quotas de tests réalisés", n'est peut-être pas une bonne idée. Les alarmes qui sonnent pour dire de demander au patient si il fume alors qu'il vient pour un problème qui n'a rien à voir et qui mérite déjà bien plus que les 10 minutes d'une consultation.

Les interventions inutiles, les politiciens qui choisissent les articles qui leur plaisent, les décisions sans avoir de preuves pour pouvoir ne serait-ce que suggérer si c'est une bonne idée ou pas, la tendance à vouloir toujours se battre jusqu'au bout face à un diagnostic, au coût parfois de souffrances inutiles, ...

Bien que le livre se termine par une note positive, autant dire que la presque totalité représente une critique du système de santé actuel. Difficile à la fin de ne pas avoir l'impression que rien ne fonctionne et que le système est corrompu et faillible, quelques directions ou exemples positifs en plus pour savoir comment améliorer les choses auraient été les bienvenues ne serait-ce que pour le moral :)

Messages clés : 

  • On transforme les personnes en bonne santé en patients, en cherchant la "meilleure santé", on dépense de l'argent pour ceux-ci au détriment des plus pauvres
  • La plupart des dépistages ont un bénéfice très limité (ou absent), ce qui n'est presque jamais indiqué, mais ceux-ci sont largement offerts, croyance "plus tôt c'est mieux pas de risques"
  • La logique et les bonnes intentions ne suffisent pas sans preuves fiables indépendantes
  • Une bonne partie de la médecine a un aspect subjectif (causes de mortalité, diagnostics, tests, etc.)
  • Écouter les patients, les informer sans orienter la réponse, leur laisser le choix
  • La responsabilité des décisions est partagée, soignant+patient, pas uniquement soignant ou patient

En une phrase :

  • Permettre aux médecins d'avoir une discussion, une relation avec le patient, selon ses intérêts et ses envies et pour son bénéfice, avec le minimum d'influences externes

[1] McCartney, M. (2012). The patient paradox: Why sexed-up medicine is bad for your health. London: Pinter & Martin.

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